En deux jours, le 1er et 2 février, la Banque d’Angleterre, la Réserve Fédérale américaine et la Banque Centrale Européenne ont pivoté.

Bien sûr, pas au sens le plus radical du terme : elles n’ont pas annoncé la fin définitive du cycle de hausses de taux enclenché début 2022 et encore moins montré la voie à de futures baisses. Trop tôt, trop engageant.
Mais le changement de ton et de cap est clair : le temps des hausses à marche forcée et des tirades de matamores est terminé, l’ère de l’évaluation prudente de la situation et de la marche à suivre, s’ouvre.

La première raison de ce pivot tient dans le caractère inédit du présent cycle économique, désormais au centre des préoccupations des banques centrales.
Il présente en effet une accumulation de forces agissant en sens inverse les unes des autres, qui donnent un sentiment d’illisibilité du climat des affaires :

  • baisse sensible de la croissance aux USA et en Europe, mais le dynamisme des services compense la faiblesse du secteur manufacturier
  • partout, malgré la baisse de l’activité, l’emploi résiste et même prospère avec un taux de chômage européen au plus bas depuis vingt ans et aux Etats-Unis depuis plus de cinquante ans. Et malgré tout, la dynamique des salaires n’est pas menaçante, avec même une inversion de la courbe de Phillips dans les derniers chiffres américains.
  • Les dynamiques inflationnistes elles aussi sont difficiles à décrypter.

La baisse est claire aux Etats-Unis mais la résistance et même la progression de l’inflation dans les services ne permet pas de déclarer victoire. Là-bas comme en Europe, la chute des prix des matières premières et tout spécialement de l’énergie, a permis une nette détente des indices de prix. Mais la relance chinoise, qui s’annonce spectaculaire après le tournant sanitaire, si elle devrait soutenir la croissance mondiale, exerce déjà une pression significative sur les métaux industriels… tout en n’inversant pas la forte décrue des prix du gaz, contrairement aux attentes !

Les contraintes de plus en plus fortes qui s’exercent sur les banques centrales sont la deuxième raison du pivot.

Contraintes financières d’abord : le niveau très élevé du niveau de dette de l’économie mondiale (360% du PIB quand même) et la charge pesant directement sur les États pour les intérêts de leurs engagements passés – désormais plus de 1000 milliards de dollars par trimestre pour les Etats-Unis – limitent leurs marges de manœuvre.

Contraintes économiques ensuite : malgré la résistance de l’emploi et des services, la chute rapide des indicateurs avancés du secteur manufacturier et la multiplication des plans de licenciement chez les géants de la technologie américaine, tout autant que les fortes incertitudes liées à la prolongation de la guerre en Ukraine, ne permettent pas d’envisager de futures fortes hausses des taux d’intérêt.

Contraintes politiques enfin : la guerre en Ukraine côté européen et le climat politique tendu aux Etats-Unis avec les discussions qui s’annoncent très difficiles autour du nécessaire relèvement du plafond de la dette, pèsent nécessairement sur les décisions et les communications des banquiers centraux, dont la responsabilité est également de ne pas aggraver des situations déjà complexes.

La dernière raison de ce changement de cap est enfin la peur de commettre une historique erreur de politique monétaire :

  • Banque Of England : ne pas reproduire le stress d’octobre 2022
  • BCE : ne pas refaire l’erreur de Trichet en 2011
  • Fed : ne pas s’approcher, même en cible, du seuil d’intérêt fatidique des 6%, seuil qui a déclenché  le krach d’octobre 1929 + le krach internet en mars 2000 + la chute du Nikkei en 1990…

La montée des marchés avait bien anticipé depuis octobre 2022 l’évolution possible de l’attitude des banques centrales.

Beaucoup d’acteurs de marchés sont sous-investis. Une attitude encore plus conciliante des banques centrales risquerait d’accentuer le mouvement haussier en dehors d’un nouvel accident géopolitique.

 

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